Émotion

L’émotion est poison et il n’y a lieu de lui porter gloire.
S’il y a un manteau à ôter, c’est bien celui-là.
Elle est aujourd’hui l’emblème de bien trop de révolution.
Et elle est la cause de bien trop de confusion.

L’émotion n’est pas un droit, si ce n’est le droit de blesser, de s’approprier ou de dévier.

L’émotion est un devoir.
Un devoir de maturation.
Un devoir d’observation.
Un devoir de concentration.
Pour la dompter comme on dompte une monture farouche.
Et l’apercevoir telle qu’elle est.
Une agitation passagère nourrie par un événement extérieur ou une pensée illusoire.
C’est une fièvre qui nous embrume le regard.
La dompter c’est l’emmener là où on veut qu’elle aille.
Là où on veut qu’elle soit.
Et non la laisser s’agiter à tous vents, en tous lieux.

Nous en devenons alors le maître.

La maitrise n’est pas le déni.
La maitrise c’est la connaissance, la transcendance.

Car l’émotion porte un visage double; l’action et le revers.

L’émotion donne naissance au regret duquel découle l’amertume, venin par excellence qui transforme l’élan de vie en accablement, c’est à dire, la mort.
L’envie, autre rejeton de l’émotion, fait naître en le coeur une force désastreuse prête à tout écraser pour atteindre ce graal fictif qui ne laisse derrière lui qu’insipidité. Une course à rebours continuellement hors d’haleine.

L’émotion, si on prend le temps de la dévisager, n’est qu’une blessure, ni plus, ni moins. Une faille sismique pouvant déclencher des tempêtes monstrueuses aux conséquences déplorables.

Aucune joie dans tout cela.

Vil est le lien qui nous unit aux émotions et à ses vapeurs fantasmatiques.

L’amour n’est pas émotion.
Soit il y a amour, soit il y a émotion.
Il ne peut y avoir les deux en même temps.
Car l’amour est ce qui soutient la vie.
Et l’émotion est un trouble qui voile cet état naturel de bonté, de beauté.

L’émotion est ce qui nous conduit hors de la paix.
L’émotion est ce qui nous conduit hors du lien.

Apercevoir l’au-delà de l’émotion c’est se souvenir d’être aussi vaste que le ciel et aussi stable que la terre.
C’est porter le regard sur l’évidence de la foi et s’approcher du sentiment.

L’émotion c’est percevoir par le trouble.
Le sentiment c’est percevoir par les sens.
Le sentiment mène à la connaissance.
L’émotion mène à la distorsion.

Une question courante, pour ne pas dire banale, pourrait alors émerger :
L’émotion, ne serait-elle pas ce qui me fait me sentir en vie ?
L’émotion est ce qui mène à la souffrance et la vie n’est pas souffrance.

La vie est don.

La bonne question est, comme le soulève Goswami Kriyananda, que vas-tu faire de cette blessure, de cette souffrance ? Que vas-tu faire de ta peine ?
Vas-tu la laisser déferler autour de toi ?
Vas-tu blesser d’être blessé ?
Et perpétuer le cycle douloureux d’euphories et désespoirs ?

Ou sortir de l’affliction de l’émotion.
Sortir de l’agitation.
Trouver ce point de jonction.
Et entrer en bénédiction.

Il n’y a qu’un pas.
Il n’y a qu’un choix.

 

Marine Bernard

Octobre 2021 - Crédit photo : Marine Bernard - Lieu de la photo : Abbaye de Belleperche, France

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